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Arrêt de la CJUE : caméra de surveillance pour la protection des biens & espace public
La directive de l’UE sur la protection des données à caractère personnel s’applique à l’enregistrement vidéo réalisé avec une caméra de surveillance installée par une personne sur sa maison individuelle et dirigée vers l’espace public.
Cependant, la directive permet de prendre en compte l’intérêt légitime de cette personne à protéger ses biens, sa santé et sa vie ainsi que celles de sa famille.
Les faits
Une famille en République tchèque a été à plusieurs reprises la cible d’attaques d’un inconnu. Les fenêtres de leur maison ont été brisées à plusieurs reprises. En réaction à ces attaques, le chef de famille a installé une caméra de surveillance qui enregistrait l’entrée de la maison, l’espace public ainsi que l’entrée de la maison située en face.
Une nuit d’octobre 2007, une vitre de sa maison a été cassée par un lance-pierres. Les enregistrements de la caméra de surveillance remis à la police ont permis d’identifier deux suspects contre lesquels des procédures pénales ont été engagées.
L’un des suspects a contesté la légalité du traitement des données enregistrées par la caméra de surveillance. L’autorité (en République tchèque) a constaté qu’il y avait effectivement eu violation des règles de protection des données personnelles et a infligé une amende au chef de famille. L’autorité a notamment indiqué que les données du suspect avaient été enregistrées sans son consentement, bien qu’il se trouvât dans l’espace public, c’est-à-dire sur la partie de la rue située devant la maison.
Question posée à la Cour
La Cour administrative suprême de la République tchèque souhaite savoir de la Cour si l’enregistrement réalisé par le chef de famille afin de protéger sa vie, sa santé et ses biens (c’est-à-dire l’enregistrement de données à caractère personnel de personnes qui ont attaqué sa maison depuis l’espace public) constitue un traitement de données non couvert par la directive parce que l’enregistrement a été effectué par une personne physique à des fins exclusivement personnelles ou familiales.
L’arrêt de la CJUE (C-212/13)
Dans son arrêt d’aujourd’hui, la Cour rappelle d’abord que la notion de données à caractère personnel au sens de cette directive couvre toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable. Une personne est dite identifiable lorsqu’elle peut être identifiée, directement ou indirectement, notamment par référence à un ou plusieurs éléments spécifiques propres à son identité physique.
L’image d’une personne enregistrée par une caméra relève donc de la notion de données à caractère personnel, dans la mesure où elle permet d’identifier la personne concernée.
De même, la vidéosurveillance enregistrant et stockant des données à caractère personnel relève du champ d’application de la directive, car elle constitue un traitement automatisé de ces données.
Deuxièmement, la vidéosurveillance portant sur l’espace public et donc ciblant une zone en dehors de la sphère privée de la personne qui traite les données ne peut être considérée comme une activité « exclusivement personnelle ou familiale ».
Intérêt légitime au traitement des données
Par ailleurs, le juge national doit tenir compte, dans l’application de la directive, du fait que ses dispositions ouvrent la possibilité de prendre en considération l’intérêt légitime du responsable du traitement des données à protéger ses biens, sa santé et sa vie ainsi que celles de sa famille. En particulier, d’une part, le traitement de données à caractère personnel peut être réalisé sans le consentement de la personne concernée lorsqu’il est nécessaire à la réalisation de l’intérêt légitime poursuivi par le responsable du traitement. D’autre part, une personne n’a pas à être informée du traitement de ses données si cette information est impossible ou impose un effort disproportionné. Enfin, les États membres peuvent limiter les obligations et droits prévus par la directive dans la mesure où cette limitation est nécessaire à la prévention, à la constatation, à l’enquête ou à la poursuite d’infractions pénales ou à la protection des droits et libertés d’autrui.
Index thématique :
Directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (JO L 281, p. 31).
Caméra vidéo, vidéosurveillance
Juridiction :
CJUE, arrêt du 11.12.2014 - C-212/13
Salutations, expert en construction